vendredi 27 juillet 2012

Simone


Banyuls, France

Quand j'ai rencontré MA, en 1995, je lisais La mort de Virgile, d'Hermann Broch. Tout de suite après, j'avais lu Mémoires d'une jeune fille rangée. Presque 20 ans plus tard, je suis à lire la suite: La force de l'âge. C'est passionnant de suivre le processus qui a accouché de Sartre et Beauvoir. En fait, c'est fascinant de voir ce qu'ils n'étaient pas et ce qu'ils sont devenus. Mais ce qui me plaît par-dessus tout, c'est sans nul doute de les suivre dans leur découverte du monde (mais je ne comprends rien à leur conception du couple, c'est pour moi du vrai charabia). En ce moment, Simone fait le même trajet que nous avons fait: elle est partie de Paris,  visite quelques châteaux de la Loire et se rend jusqu'en Espagne. Je revisite avec elle, avec ses yeux, des lieux vus. Par contre, elle a vu l'Andalousie, pas moi. Je ne crois pas avoir beaucoup de points communs avec Simone de Beauvoir, mais plusieurs passages m'éclairent et traduisent ce que je sens, surtout en voyage. Hier soir, ce passage m'a frappée:

Sartre avait autant de curiosité que moi, mais moins gloutonne. À Tolède, après une matinée diligente, il aurait volontiers passé l'après-midi à fumer sa pipe sur la place Zocodover. Moi, j'avais tout de suite des fourmis dans les jambes. [...] J'avais entrepris de tout connaître du monde et le temps m'était mesuré, je ne voulais pas gaspiller un instant.  [...] J'ignorais les demi-mesures; dans les régions que nous n'avions pas rejetées, par décret, au néant, je n'établissais pas de hiérarchies; de n'importe quoi, j'attendais tout: comment accepter de ne rien manquer? [...] "À quoi bon voyager? on ne se quitte jamais", m'avait dit quelqu'un. Je me quittais; je ne devenais pas une autre, mais je disparaissais. Peut-être est-ce le privilège des gens sans cesse en proie à des projets, que ces trêves où soudain le temps s'arrête, où l'existence se confond avec la plénitude immobile des choses: quel repos! quelle récompense!

Et il y a son besoin d'être seule, de marcher seule en randonnée, d'être dans le silence. Elle n'en souffre pas. À travers ses mots, j'entends mon boulanger de Coarraze  me dire: Plus on est nombreux, moins on est libres.

Parlant d'être seule, les filles partent cette fin de semaine et ça me fait un petit trou au coeur et une boule dans mon ventre. Leur valise est prête, on a fait le plein de câlins hier. Même ma grande Marguerite est venue se coller près de moi. Éléonore, elle, a chassé son papa de son lit et a dormi collée. 

Bon week-end!


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