dimanche 8 juillet 2012

Le dépassement

Vendredi, nous avons choisi d'aller admirer le pic du midi d'Ossau. Évidemment, il ne s'agissait pas d'escalader le pic, mais d'aller l'admirer des lacs d'Ayous. Encore une fois, cette randonnée nous avait été suggérée par notre boulanger. Une quarantaine de kilomètres séparaient notre maison d'Asson du lac Bious-Artigues d'où commençait notre randonnée. C'est équipés de notre pique-nique, de nos bouteilles d'eau et chaussés de nos espadrilles - qui avaient séché grâce au bon truc de Majorie: les fourrer de papier journal que l'on remplace par du papier sec au fur et à mesure qu'il s'imprègne de l'eau de nos chaussures - que nous sommes partis à l'aventure.

À l'office du tourisme, on nous avait dit que cette rando durait 5h30. Nous l'avons terminée en 6h30. ÉPUISÉS. D'abord, on monte en forêt, on enjambe des systèmes racinaires, on voit peu de paysages. Nos corps sont aussi fatigués des autres randonnées. Quand on pense que l'on doit marcher pendant 5h30, on peut se démotiver rapidement! À un moment donné, on débouche sur une vallée ensoleillée où paissent des vaches qui portent une petite clochette au cou. Je pense que c'est un bel endroit où pique-niquer. Nous nous installons sur des roches plates et sortons nos provisions. Il fait bon: le soleil brille, les clochettes des vaches tintent, des gens sont endormis un peu plus loin. Tout à coup, une vache décide de se déplacer, tout le troupeau suit. Seigneur, j'ai un peu peur des vaches - en fait, j'ai un peu peur de tous les animaux! Riez, c'est correct. Cela dit, Majorie n'est pas la meilleure amie des vaches non plus! Bref, on remballe nos victuailles et on se remet au travail. Une montée commence.

Je pars en avant rapido pour fuir les ruminantes. Je sais que les quatre autres me suivent. Et là, j'entre dans ma bulle, un peu comme durant un accouchement. Je suis seule dans ma tête et j'accepte la douleur que me cause cette marche qui ne finit pas. J'avance, je regarde mes pieds. Et là, le pic est devant moi. Une vallée s'étend à mes pieds. Sur un versant, à quelques kilomètres d'où je me trouve, un autre troupeau de vaches broute. Au loin, le son de leurs clochettes. C'est plus que beau. À ce moment-là, je me suis fait la promesse de revenir dans cette région. C'est comme écrit dans le ciel.

Il faut continuer. MA me crie au loin qu'Éléonore n'en peut plus. Je les attends et je prends la relève de MA. J'accompagne Éléo, l'encourage, lui parle, lui change les idées. On ne peut pas rebrousser chemin, car on a plus de la moitié fait - croit-on. Je lui parle de sa naissance. J'avais si mal que je voulais tout arrêter. Bien sûr, c'était impossible, il fallait que je continue pour qu'elle vienne. Elle a compris l'idée. Elle a crié très fort dans les montagnes et continué son chemin. Je ne sais pas d'où elle a tiré sa force. Pas du tout. Marguerite était avec Majorie. Ce n'était pas facile, mais leur discussion lui donnait de l'entrain. Et puis on s'imaginait que tout en haut on trouverait un bon café au lait et des chocolatines.

Et puis on a aperçu le refuge se dresser au loin devant nous. On était plein d'espoir. Je disais à Éléo qu'elle pourrait dormir un peu dans mes bras. Et on pensait à notre café... Et bien une fois au refuge, on a trouvé des toilettes propres, mais pas de café au lait que du filtre. On pouvait y entrer et commander quelques trucs. Une famille s'y était installée pour une semaine et offrait des services de restauration bénévolement. À notre arrivée, elle sortait du service du midi et semblait complètement dépassée par les évènements. Majorie a laissé faire sa crêpe, et moi j'ai terminé mon fromage et croqué une pomme.

Il fallait repartir. La température avait baissé. Le coeur n'y était pas vraiment. À ce moment-là, on ne savait trop quel bord prendre, car le sentier était peu ou prou balisé. Il y avait bien des roches marquées d'un mouton pour indiquer la route de pâturage, mais allions-nous suivre un parcours de moutons? L'autre sentier montait... encore. Nous, on voulait redescendre. Mes fils se sont touchés à ce moment-là. Pas question que je prenne un sentier qui menait on ne sait où, peut-être dans un autre refuge encore plus haut. Oh que non. J'en avais marre. Quand mes fils se touchent, je me suis rendu compte qu'il ne fallait pas m'encourager ou tenter d'être positif. Il faut me laisser dans ma façon très réaliste d'aborder la situation. À un moment donné, les fils décrochent et je reviens. Faut seulement me laisser 5 minutes. Éléo dit qu'on devrait couper mes fils. Ben oui.

On a donc pris le sentier qui montait. On y a croisé d'autres randonneurs qui nous ont confirmé que c'était la route pour redescendre. La descente a duré 3 heures. Trois heures de pression sur les genoux.
Je me répète je sais, mais je ne sais pas comment les filles ont fait cela. Marguerite était particulièrement fière d'elle. Elle n'a eu que deux minutes de découragement à l'idée que nous étions perdus. Sinon, elle a encaissé tout le travail.

J'ai même réussi à courir quelques minutes vers la fin. C'est plus facile de descendre en courant qu'en marchant. À notre arrivée au stationnement, il y avait plein de chevaux en liberté! Ils venaient nous voir, très habitués aux gens. Nous aurions pu faire la rando à cheval... mais je préfère me fier à mes jambes!

Au retour, dans l'auto, nous étions silencieux et épuisés. Encore une fois, nous avons soupé d'une pizza. J'étais incapable de cuisiner, ne serait-ce qu'un oeuf. Nous étions vraiment tous fiers d'avoir réussi cette randonnée. J'ai l'impression que la montagne procure de la confiance en soi. Je crois que l'expérience a été très formatrice et positives pour les filles.

Des photos de la randonnée sans fin, ici.

Le samedi marquerait le départ du Béarn. Snif. Je ne veux pas partir.

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